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Haïti-Santé : Automédication, un problème majeur pour la population capoise

La santé est l’un des droits fondamentaux que possède tout individu indistinctement, c’est pourquoi, à travers le monde, préserver la santé constitue une grande priorité de l’Etat ainsi que des personnels du système sanitaire (Médecins, infirmières, agents santé, étudiants en médecine…) dans le but de maintenir et de rétablir le bien être total de l’être humain de façon préventive et en traitant les différentes maladies. D’un autre coté, d’autres personnes considèrent la santé comme étant une richesse à préserver et qui ne doit pas être négligée.

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Voulant préserver leur santé, les gens sont obligés de pratiquer ce qu’on appelle l’automédication qui se définit selon l’OMS, comme étant, le traitement de certaines maladies par les patients grâce à des médicaments autorisés, accessibles sans ordonnance, sûrs et efficaces, dans les conditions d’utilisation indiquée. C’est un problème de santé publique qui suscite pas mal de questions comme par exemple : Quand est-ce que les gens consultent vraiment un médecin ? Quels sont les risques de l’automédication ? Qu’est ce qui est à la base de cette pratique ? Qui pratique vraiment l’automédication ?

Selon une estimation de l’OMS, sur la population du globe qui dépasse quatre milliards d’habitants, il y a 80% qui ont recours à la médecine traditionnelle pour satisfaire leurs besoins en soins de santé primaire(8). 5 à 10% de médicaments vendus en France sont délivrés sans ordonnance médicale(9).

Aux Etats-Unis, l’automédication est très prévalente: 52,6% des Adultes et 41,6% des enfants en sont concernés(10). En Afrique une étude menée sur 764 malades atteints d’IST à KUMASI (GHANA) a montré que 74,5% de ces patients avaient pratiqué l’automédication avant d’aller à l’hôpital(11). Au Mali, l’importance de cette pratique est considérable. Elle est l’expression de l’automédication qui s’observe dans toutes les couches de la société.

En Haïti, nous faisons face à des graves problèmes qui méritent de retenir l’attention de tout un chacun dans la société comme c’est le cas, pour l’automédication qui doit être un sujet de débat. Le manque de contrôle des médicaments dans le secteur médicamenteux entraine la disponibilité des médicaments et qui n’ont jamais obtenu l’autorisation de mise sur le marché(AMM) ».

Dans la majorité des pays pauvres, le niveau économique est vraiment insuffisant pour répondre aux différents besoins socio-économiques tant sanitaires de la population, qui quotidiennement fait face à des problèmes de santé aiguë ou chronique. Alors face à un tel cas, il suffit d’en trouver certaines solutions, bien que certaines personnes pensent que, seulement un médecin peut avoir la solution et d’autres pensent contrairement. Ces deux (2) formes de réflexions sont fondées exclusivement soit sur un aspect éducatif, économique et même culturel…

Comme tout autre jeune du pays, les problèmes de la société me tiennent à cœur et surtout les problèmes sanitaires. La ville du Cap-Haitien, qui nous intéresse dans le cadre de ce travail, connait depuis plus de 20 ans une urbanisation uniquement dans ses dimensions démographique (taille de la population) et morphologique (concentration de la population et de l’habitat) sans ses dimensions fonctionnelles (administration) et d’équipements (infrastructures). Cette situation est désignée par les experts en aménagement sous le terme « d’urbanisation sans urbanisme ».

Sur une superficie de 59.5km2, le Cap-Haitien, le chef lieu du département du nord comporte près de 225000 habitants d’après les données du recensement de 2003, un chiffre qui est de loin de ce qu’on peut avoir de nos jours parce que depuis 2008, après les deux inondations qu’a connu la ville des Gonaïves et le récent séisme meurtrier de 2010 sans oublier tout le marasme économique criant que vit le pays depuis 2006, la ville a reçu plus de 50000 nouvelles personnes en quête d’un refuge et de la paix. A en considérer la croissance démographique sur ces quinze (15) dernières années, Cap-Haitien avoisinerait plus de 350.000 personnes aujourd’hui. Alors
cette croissance démographique rapide impacte sur la qualité des soins de santé dispensés par le secteur public comme privé où la majorité des personnes n’ont pas vraiment accès et entraine aussi un défaut de fréquentation des hôpitaux, c’est-à-dire il existe le désintéressement d’aller à
l’hôpital.

Plus de trois (3) ans de cela, au cours des séances de stages dans les différents services
de l’Hôpital de Justinien (Chirurgie, Médecine interne,…) où l’on a réalisé des séances d’interrogatoire auprès des patients, Durant ce travail on a pu remarquer que beaucoup des patients prennent des médicaments sans avis médical pour un quelconque problème de santé, que nous considérons comme étant un acte d’automédication’’. Ils ont eu seulement recours à cette pratique, qui consiste non seulement à se procurer des médicaments non remboursables, sans prescription, mais aussi certaines fois sans être conseillés(es) par un pharmacien, pour soigner
des petits maux, une rhume, une migraine ou des troubles digestifs…. Ignorent les risques que cela peut entrainer pour qui connaît le danger du médicament et jusqu’à preuve du contraire on connait tous que « tout médicament est une drogue quand il n’est pas utilisé de façon rationnelle ». On rencontre ce problème beaucoup plus chez les jeunes filles en âge de procréer, pendant leurs menstruations, où elles ont des fortes douleurs pelviennes (dysménorrhée) et pour en faire face sont obligées de prendre des antalgiques sans ordonnances médicales et bien des fois, c’est après un rapport sexuel non protégé en phase d’ovulation et elles sont obligées de prendre des pilules comme « la Provea, le mycrogeno, after Day », dans le but d’éviter d’une grossesse non désirée ou prématurée.

Nombreux sont ceux qui pratiquent l’automédication. Du point de vue économique les gens n’ont pas de grands moyens, ce qui les empêche d’aller a l’hôpital pour se faire consulter et aussi l’absence des médecins de services dans certains hôpitaux entraine le désintéressement des personnes de s’y rendre à l’hôpital. Ils passent presque tous leurs temps au sein de leur clinique, et pour se faire consulter dans un clinique ça demande beaucoup d’argent, faute de moyens, alors ils ont préféré d’aller dans une boutique pour en procurer d’un médicament, afin de calmer leur douleur.

La pratique de l’automédication est beaucoup plus élevée dans les zones avoisinantes
du Cap-Haitien (Limonade, Quartier Morin, …) en raison d’un manque d’infrastructures sanitaires. Il devient plus accessible de trouver un médicament chez un ami ou un voisin qui l’a
déjà pris pour un même problème que d’en trouver un lieu de consultation pour se soigner convenablement. D’un autre coté, il y a le secteur commercial informel qui rend accessible la vente des médicaments surtout à travers les autobus de transport public et aussi on peut tous constater un manque de contrôle du côté des responsables sanitaires dans le département ce qui aussi rend l’accessible à l’achat (bien que chose qui est courante dans presque toutes les autres villes du pays). Chose qui reste un danger pour la population !

Du point de vu culturel, le peuple Haïtien se lie à sa culture comme tout autre peuple du monde et en Haïti il y a ce qu’on appelle les jours de marché « Jou Mâché » qui est monnaie courante dans les milieux ruraux et cette coutume réunit presque toute l’ensemble de la population de la communauté en question, surtout ceux et celles qui vendent des médicaments de façon informelle (Argent Marketing). Ces derniers ont profité de présenter toutes sortes de comprimés
(Grenn) utiles pour toutes sortes de maladies. Donc une telle tendance ne cesse pas d’aggraver la situation sanitaire des gens dans le département. Et sans oublier que la majorité de la population, vient consulter à l’Hôpital que lorsque les pathologies atteignent une phase chronique surtout lorsque ça demande l’avis d’un chirurgien….cette pratique parait légitime pour ces gens en se soignant soi-même. En ignorant toutes les complications d’ordre rénal, cardiaque et hépatique pour citer que ça. L’utilisation des antibiotiques sont beaucoup plus pratiques surtout pour les problèmes d’infection.

L’automédication est liée aux déterminants de la santé qui y ont des impacts directs sur la santé et de loin on pourrait les considérer qu’ils sont aussi la racine de problèmes sanitaires, c’est pourquoi le manque d’activités économiques est l’une des causes parmi tant d’autres où les genres ne veulent pas aller a l’hôpital en raison d’un faible moyen économique et aussi la vente des médicaments de façon informelle représente un moyen de gagner pour leur vie. L’État haïtien doit donc incessamment agir sur le taux de croissance déjà insupportable de la population tenant compte des limitations courantes du système de soins, permet aux prestataires des soins d’en trouver des moyens accessibles afin qu’ils soient présents dans les milieux hospitaliers, construire beaucoup plus d’infrastructures hospitaliers pour desservir la population et établir une surveillance adéquate sur le marché informel et aussi éduquer la population sur l’ensemble des dangers que cela peut entrainer.

LE FACTEUR HAÏTI (LFH)/ Dr Rosemond FRANÇOIS, Auteur